L’AUTO ÉDITION, AVENIR DE L’ÉDITION EN AFRIQUE ?

En préambule, mon expérience de l’édition en France

 À en croire les statistiques du Syndicat National de l’Édition (SNE), il y aurait plus de 10.000 éditeurs en France ; ce qui place cette dernière très largement en tête sur le plan européen, en matière d’édition. Malgré cela, de nombreux auteurs ne parviennent pas à se faire publier. Il faut dire, à leur décharge, que les maisons d’édition dites « classiques » sont inondées par tellement de manuscrits, qu’il est difficile pour tous les auteurs néophytes de se faire éditer.

Bien sûr, je ne m’attarderai pas sur les cas évidents de refus de manuscrits inexploitables, de « célèbres inconnus », qui se « voyaient déjà tout en haut de l’affiche », pour paraphraser Aznavour… Mon propos concerne plutôt tous les autres, laissés pour compte, dotés pourtant d’un potentiel prometteur ou indéniable. Les exemples sont légion d’écrivains devenus célèbres, qui ont essuyé plusieurs refus avant de voir leurs textes acceptés par une maison d’édition. On l’aura compris, se faire publier par une grande maison d’édition, en France où j’ai longtemps vécu, est presqu’aussi difficile pour tout auteur néophyte que de gagner à la loterie !

Pour ce qui me concerne, comme beaucoup d’amoureux de la littérature, mon parcours rejoint celui d’un grand nombre d’écrivains qui ont frappé en vain à la porte des grandes maisons d’édition traditionnelles françaises ayant pignon sur rue, côtoyé le compte d’auteur pour finalement découvrir et adopter l’auto édition. Une pratique devenue plus attrayante avec l’avènement du numérique. De nos jours, des auteurs de plus en plus nombreux choisissent la liberté que procure l’auto édition pour publier leurs œuvres. Certains d’entre eux ayant, par la suite, été repérés par des grandes maisons d’éditions, grâce aux succès de leurs publications.

Quid de L’Afrique?

L’Afrique, cette jeune-vieille dame au passé millénaire, mamelle de l’humanité, souvent enfermée dans des clichés désuets et réducteurs ! Comme si, elle n’avait rien d’autre à offrir au monde, que sa noire misère !… L’Afrique, un continent de tous les contrastes et de tous les possibles, ployant sous le joug des soubresauts de l’histoire, mais qui tel un phénix, a toujours su renaître de ses cendres…! L’Afrique, un continent plein de promesses, avenir de l’humanité, en dépit des apparences… Évidemment, pour cette dernière, confrontée à des défis sociopolitiques et économiques immenses, développer les métiers du livre, n’est pas sa priorité ! On comprend aisément que pour ces raisons, se faire publier en Afrique n’est pas plus aisé.

Pour le cas spécifique du Gabon dont je suis originaire (et où je me suis réinstallée, depuis une bonne dizaine d’années), si le nombre d’écrivains y a augmenté en une décennie, les autres métiers du livre sont, par contre, encore peu ou mal représentés. En effet, l’auteur n’est que le premier maillon de la chaîne, qui ne pourrait être lu sans le concours de tous les divers métiers gravitant autour de l’édition, et qui participent à la production, à la commercialisation, et à la diffusion du livre.

Dans ce petit pays d’Afrique Centrale, d’une population d’à peine 1.600.000 habitants, dont près de la moitié est concentrée à Libreville, la capitale, de la conception à la publication du livre, le combat est difficile ! Les rares maisons d’éditions ne sont pas en mesure d’assumer seules, localement, les coûts de fabrication, de commercialisation et de diffusion ; ce qui, bien entendu, a une incidence sur le prix du livre. Écrire et publier au Gabon est donc encore, aujourd’hui, un dur parcours du combattant, que l’écrivain ou l’éditeur affronte plus par amour de l’art.

Un autre paramètre à prendre en compte est la tradition d’oralité qui demeure encore très vivace dans l’inconscient collectif. Or, à l’heure où la mondialisation voit surgir et se développer de nouvelles formes d’expression de communication toujours plus performantes ; à l’heure où l’Occident s’inquiète de la disparition annoncée ou fantasmée du livre papier au profit du livre électronique, l’Afrique, elle, confrontée à d’autres priorités, cherche encore le meilleur moyen pour promouvoir le livre papier…

Bien sûr, nous avons d’autres priorités économiques, me dira-t-on. Mais, faut-il le souligner, le développement d’un pays, passe nécessairement par une bonne instruction. Et les ouvrages de référence que sont les livres d’enseignement, s’appuient volontiers sur les œuvres littéraires pour illustrer et diversifier les sources d’apprentissage.

Il y a lieu aussi, de constater, qu’à notre époque télévisuelle où l’image est devenue reine, les jeunes reçoivent en permanence et de façon passive, toutes sortes d’images véhiculées, bonnes ou mauvaises, et qui s’imprègnent durablement dans leur esprit, avec des conséquences parfois néfastes. Beaucoup de jeunes entrent au collège sans avoir parfaitement maîtrisé les mécanismes de la lecture et de l’écriture. Ceci est un handicap et un terreau pour l’illettrisme et l’analphabétisme, et facteur d’exclusion dans notre société moderne, et partant, d’appauvrissement culturel, surtout dans un continent déjà confronté à de nombreux défis. La vulgarisation et la promotion de la littérature peuvent de ce fait, ouvrir aux jeunes et aux moins jeunes, d’autres perspectives d’avenir.

C’est là, l’occasion de rappeler que la littérature, outil de communication par excellence, est aussi source d’évasion et de distraction. De nos jours, la mémoire d’un peuple ou d’un continent ne peut plus se baser uniquement sur l’oralité. La mémoire orale est imparfaite et sélective. C’est bien connu : « Les paroles s’en vont, mais les écrits restent »… Gravés pour l’éternité; témoins pour les générations futures et pourquoi pas, pour d’autres formes de civilisations, de ce que furent les habitants d’une petite planète dénommée Terre…

La littérature contribue aussi à promouvoir et à sauvegarder la richesse du patrimoine culturel matériel et immatériel, dans un contexte de globalisation qui, s’il participe à la modernisation, a pour revers, la disparition programmée de l’identité culturelle. Selon l’ONU, une dizaine de langues africaines meurent chaque année, faute de locuteurs ! Or, ne pas maîtriser sa langue maternelle, contribue à l’acculturation et à l’appauvrissement du continent ; d’où le rôle important des divers acteurs du métier du livre dans la conservation du patrimoine culturel d’un pays.

Pour en revenir à l’édition, il ne suffit pas en Afrique, et plus particulièrement au Gabon, de trouver un éditeur ; l’autre écueil, et non le moindre, c’est de trouver un   « bon » éditeur ! La plupart, demandent une participation de l’auteur, compte tenu des difficultés rencontrées localement dans le milieu de l’édition et évoquées plus haut. L’ennui, c’est que bien souvent, on en est réduit à attendre comme Sœur Anne « qui ne voit rien venir »… Ce qui fut mon cas…

Beaucoup d’écrivains sont ainsi tentés, avec des fortunes diverses, par l’aventure de l’auto édition ; seule piste qu’il me restait à explorer. Avec la perspective de devenir plus tard éditeur en publiant d’autres auteurs, à plus ou moins brève échéance. Ce qui s’est concrétisé avec la création des Éditions Amaya.

Pourquoi Copy-Media ?

De nos jours, rares sont les éditeurs en Europe, qui assurent en totalité toute la chaîne de fabrication du livre ; l’impression et le façonnage étant généralement confiés à des prestataires extérieurs. A fortiori en Afrique ! Ainsi, il ne me restait plus qu’à trouver une imprimerie pour m’accompagner dans cette fascinante aventure littéraire et éditoriale…

Mon choix s’est donc porté sur Copy-Media, il y a deux ans de cela. La première raison toute simple : la chaleur de l’accueil, contrastant singulièrement avec une première adresse parisienne qui m’avait été suggéré. Ensuite, la disponibilité de toute l’équipe, et notamment de mon attachée commerciale, Élodie Dartois, que je salue ici. Puis, bien sûr, la qualité des ouvrages, la rapidité d’exécution et de réception des commandes, ainsi que le bon rapport qualité-prix, ont joué dans la balance. Sans oublier le fait que Copy-Media collaborait déjà avec un grand nombre de pays africains, dont le mien.

Aujourd’hui, à l’ère de la mondialisation et du numérique, l’éloignement géographique ne constitue plus un handicap. La précision dans les détails et l’imagination sont le maître mot, pour y remédier. Et il y a bien sûr, la possibilité d’avoir recours aux conférences téléphoniques ou vidéo en cas de besoin, pour éclaircir certains détails.

Une franche collaboration s’est instaurée depuis deux ans, avec la mise en place d’une organisation désormais bien rôdée, depuis l’impression jusqu’au façonnage. Et c’est toujours avec le même plaisir que je réceptionne les ouvrages à Libreville, sachant qu’il n’y aura pas de mauvaises surprises et qu’ils feront bien des heureux…

Mon souhait ? Continuer à éditer des livres, qui susciteront peut-être, l’envie d’écrire et pourquoi pas, de refaire le monde, par le biais de leur plume, chez de nombreux jeunes ou moins jeunes. Car, comme l’a si joliment dit Carvel : « L’écrivain rêve d’être le sculpteur des mots et le peintre des idées » !

En effet, que serait le monde sans rêves?…

À PROPOS DE L’AUTEUR

(Solange ANDAGUI BONGO AYOUMA)

Médecin pédiatre de formation, je suis depuis quelques années, inspecteur général chargé de l’action sanitaire et sociale à Libreville, au Gabon. Mon rôle est d’évaluer le fonctionnement des structures sanitaires et de proposer des solutions pour leur amélioration. A côté de cela, je continue à consulter quelques heures par semaine, à titre bénévole, dans le domaine de la néonatologie où la demande est importante et les spécialistes encore peu nombreux. Je dispense par ailleurs, des cours de pédiatrie à la Faculté de Médecine de Libreville. Ce qui me fait des journées bien remplies ! Et l’édition dans tout cela, me direz-vous ? Un concours de circonstances !

Férue de littérature depuis ma plus tendre enfance (ce qui m’a valu le surnom de « Colette »), c’est l’écriture et la publication en 2008, de mon premier roman, La Tentation d’Adam, qui m’ont fait découvrir l’univers de l’auto éditionauto édition. Le succès local du roman et la demande d’autres auteurs qui, comme moi, avaient été confronté à des éditeurs peu scrupuleux, m’ont poussé à continuer l’aventure en créant ma propre maison d’édition. C’est ainsi que sont nées Les Éditions AMAYA, véritablement fonctionnelles dans leur forme actuelle depuis 2012, après une période que j’ai mise à profit pour me familiariser avec le monde de l’édition et mûrir mon projet éditorial. L’organisation de la première édition du concours littéraire de la maison d’édition d’une part, et la collaboration avec Copy-Media, d’autre part, ont permis de donner une nouvelle impulsion à cette jeune structure, que je souhaite voir garder sa vocation première, celle de contribuer à l’essor culturel. D’où l’accent que nous mettons sur la qualité de nos ouvrages. Dans cette optique, nous comptons publions à compte d’éditeur, 10 à 20 titres par an au maximum.

Notre catalogue compte à ce jour, près d’une vingtaine de titres déjà parus ou à paraître: ouvrages pratiques (guides de santé adapté au contexte local; lexiques de langues gabonaises; ouvrages de plantes médicinales; guides touristiques);   livres de pédagogie (annales de révision du bac adapté au programme gabonais); et aussi, bien sûr, des ouvrages de littérature générale (romans, essais, poèmes).

L’objectif principal des Éditions Amaya reste la promotion de la littérature en général, africaine et gabonaise en particulier, en vue de susciter d’une part, le goût de la lecture qui ouvre l’esprit à la multi-culturalité enrichissante, et provoquer d’autre part, l’émergence de nouveaux talents littéraires. Nous comptons mener ce vaste programme par l’organisation de concours littéraires, d’ateliers d’écriture, de salons du livre, et autres caravanes littéraires. Toutes ces manifestations devant être bientôt soutenues par la Fondation Amaya pour la Promotion de l’Enseignement et de la Culture (FAPEC).

Nous espérons, par ces faits, apporter notre modeste contribution à l’édification d’un pays, confronté à de nombreux défis. Comme l’a si bien dit Jules Renard: « Rêve de grandes choses, cela te permettra au moins, d’en faire des petites« ..

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